Programme :
Franz LISZT
– Prélude et fugue sur le nom de B-A-C-H
– Variations sur Weinen, klagen, Sorgen
Johannes BRAHMS
– Choral prélude op. 122
César FRANCK
– Choral n°3 en la m
Programme :
– Prélude et fugue sur le nom de B-A-C-H
– Variations sur Weinen, klagen, Sorgen
– Choral prélude op. 122
– Choral n°3 en la m
« L’orgue est certes le plus grand, le plus audacieux, le plus magnifique de tous les instruments créés par le génie humain. Il est un orchestre entier, auquel une main habile peut tout demander, il peut tout exprimer. » (Honoré de Balzac).
A l’époque romantique, l’ambition nouvelle de l’orgue est de concurrencer l’orchestre, vaste projet qui bouleversa les conceptions classique et baroque de l’instrument. A l’orgue en hauteur succède l’orgue horizontal. Toutes sortes de remaniements seront appliqués, les uns conservés, d’autres abandonnés et en définitive l’esthétique romantique donna une ampleur extraordinaire à l’instrument.
Comme dans toute évolution d’un instrument cela donna lieu à quelques exagérations. Mais en dépit de quelques défauts, c’est à cet instrument que des César Franck ou des Widor ont consacré le meilleur de leur génie. Car si l’orgue baroque n’a connu qu’un seul Bach, l’orgue romantique compte parmi ses tenants une foule de Bach : Mendelssohn, Schumann, Bruckner, Liszt, Brahms et César Franck.
Franz Liszt (1811-1886)
Prélude et Fugue sur B. A. C. H.
Après sa mort, en 1750, Johann Sebastian Bach a bien failli tomber dans un oubli presque complet : son langage savant était déjà passé de mode de son vivant, dès la décennie 1740, et ses propres fils illustraient par leurs œuvres un goût nouveau, fait de sensibilité à fleur de peau ou de style galant un peu superficiel. Bien que certaines œuvres, comme Le Clavier bien tempéré, n’aient jamais cessé d’être jouées par les clavecinistes et les pianistes, surtout à titre d’exercice, la musique de Bach a eu la chance d’être à plusieurs reprises « redécouverte » et remise à l’honneur.
Bach, ce n’est pas seulement un nom illustre. Ce sont aussi quatre lettres qui, dans la notation solfégique allemande (B = si bémol, A = la, C = do, H = si bécarre), forment motif que le cantor avait lui-même introduit dans certaines de ses compositions, notamment L’Art de la fugue et dont se sont inspirés nombre de musiciens, de Schumann à Schönberg et au-delà.
Liszt est également l’auteur d’une œuvre originale en hommage à J.S. Bach, utilisant le motif de son nom, le Prélude et Fugue sur le nom de B. A. C. H. Pour l’inauguration du nouvel orgue de la cathédrale de Merseburg, Franz Liszt compose cet impressionnant morceau reposant sur le motif B. A. C. H. – un choix témoignant à quel point il associe le « roi des instruments » à la figure du cantor de Leipzig. Cela ne l’empêchera pas toutefois d’adapter l’œuvre au piano en 1871. Les quatre notes du motif « B. A. C. H. » ouvrent d’emblée le Prélude, page sombre qui va d’inspirations méditatives en éruptions virtuoses, alternant textures pseudo baroques et traits romantiques.
Liszt utilise ici le motif B. A. C. H. comme une matrice de chromatisme, dans un langage tout à fait moderne et personnel. Cette harmonie sans cesse mouvante est favorable à une expression héroïque, exaltée et tourmentée, portée à l’incandescence par une virtuosité transcendante.
Variations sur « Weinen, Klagen, Sorgen, Zagen »
En 1859, Liszt compose un prélude prenant appui sur un motif présent dans le premier chœur de la cantate de Bach « Weinen, Klagen, Sorgen, Zagen » (« Pleurer, gémir, se tourmenter, désespérer »). Il le réutilise en 1862, peut-être car sa fille Blandine Ollivier vient de disparaître, 6 pour bâtir ces Variations. Puissantes, sévères, pathétiques, celles-ci reposent sur le principe de la « passacaille » : le motif en question, une chute chromatique exprimant l’accablement et le désespoir, est obstinément répété, tandis que le discours musical se métamorphose autour de lui. Un vaste récitatif apporte une accalmie, puis finit par mener au point culminant de l’œuvre, véritable cri de désespoir. En réponse consolatrice, s’élève alors le lumineux do majeur du choral « Was Gott tut, das ist wohlgetan » (« Ce que Dieu fait est bien fait »), qui refermait déjà la cantate de Bach en 1714.
Johannes BRAHMS (1833 – 1897)
– Choral prélude op. 122
Brahms passa l’été de 1896, dernier été de sa vie, à Ischl, en Haute-Autriche. Il avait perdu un grand nombre de ses amis les plus proches au cours des années précédentes, dont le pianiste et chef d’orchestre Hans von Bülow et le musicologue Philip Spitta, mais la perte la plus cruelle fut sans doute celle de Clara Schumann, victime d’une attaque en mai 1896. Sa propre santé souffrit probablement des quarante heures éreintantes qu’il lui fallut pour se rendre à l’enterrement de son amie ; le cancer du foie qui devait l’emporter au mois d’avril suivant était déjà fort avancé, et Brahms passa une grande partie de son temps à mettre ses affaires en ordre. C’est à Ischl qu’il composa sa dernière œuvre, les Onze préludes de choral opus 122. Il s’agit d’une musique intensément personnelle et, si certains des chorals choisis par Brahms traitent de la mort, le recueil n’est pas exclusivement tourné vers la fin. En fait, la pièce la plus connue, Es ist ein Ros’ entsprungen, traite d’un commencement de la plus grande importance. Même dans les pièces évoquant la mort, y compris la version finale de O Welt ich muss dich lassen, l’accent est mis sur la félicité et la transcendance qui succèdent à l’existence mortelle. Si Brahms mentionna dans une lettre que ces pièces n’étaient pas destinées à la publication, il n’en détruisit pas le manuscrit comme il le fit de tant d’autres œuvres, et fit même copier au propre les sept premiers préludes ; son ami et éditeur Mandycziewski y voyait le signe que Brahms avait peut-être l’intention d’ajouter de nouvelles pièces. Les Onze préludes furent finalement publiés en 1902.
César FRANCK
– Choral n°3 en la m
Les dernières années de la vie de César FRANCK virent l’éclosion de quatre chefs-d’oeuvre qui sont restés les points lumineux de son œuvre : la Sonate pour violon, écrite pour Eugène Ysaÿe, la Symphonie en ré mineur, le Quatuor à cordes et enfin les trois Chorals pour orgue, qui furent son dernier chant. Ces «Trois chorals pour orgue» – n° 1 en mi majeur, n° 2 en si mineur et n° 3 en la mineur – composés durant l’été 1890, à Paris (et non à Nemours, comme on l’a longtemps pensé), terminés les 7 août, 17 et 30 septembre (*), ne comportent pas de numéro d’opus, mais sont numérotés 38 à 40 dans le catalogue FWV
Ces trois chorals ont été publiés après sa mort en 1890, l’œuvre constitue un vrai testament artistique et spirituel de l’auteur, Franck l’écrivit le long des mois d’août et de septembre 1890 pendant une longue convalescence causée par un grave accident. Le manuscrit a été trouvé le 8 novembre, jour de sa mort, sur son bureau de nuit. En ce cas, le temps passé de sa dernière publication d’une récolte de pièces pour orgue a eu un rôle fondamental à l’intérieur du procès de maturation de l’auteur. Dans cette œuvre Franck est réussi à synthétiser toute son expérience et son développement artistique.